Benoit Albert Claude
Je suis beaucoup trop vieux
Je suis beaucoup trop vieux, à l'épreuve du feu,
des flammes libérales comme un acier rougeoie,
trempé au cœur des braises.
Mais mon âme ne plie pas sous la force des coups
des dogmes prétentieux, je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, les larmes viennent aux yeux,
à voir faner l’œillet, la rose et le muguet,
l'espoir à court d'idées, l'avenir aveuglé,
Un fort torrent de haine envahir tous les cieux,
je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, mon cœur se brise en deux,
quand 1% ont tout, mais ne partagent rien,
la pauvreté prospère. Au pays des vauriens,
madame la misère s’en va baiser les gueux,
je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, mes pieds noirs et boueux,
La terre qui tremble et jette la planète sous les eaux.
L'exil climatique, l'agonie des oiseaux,
Les forêts vertes flambent, les hommes se prennent pour dieu,
je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, mon esprit malheureux,
quant s’éteint l'humanisme, pris aux toiles des drapeaux
que s'insinuent les loups, jusqu’aux fonds des cerveaux,
que nos têtes retiennent les refrains des factieux,
je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, mon teint cadavéreux,
mon corps criblé de balles et troué de plaies rouges,
croisade ou bien djihad, plus un membre ne bouge.
La liberté se meurt dans un massacre aux dieux,
je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, dans un grand siècle hideux
finissant jamais de faire la guerre à la vie,
de jeter sur les routes des foules ahuries,
les yeux remplis d'effroi, de récits désastreux
je suis beaucoup trop vieux.
Je suis beaucoup trop vieux, je vous fais cet aveu,
fatigué par ce monde égoïste et cruel
où la loi du plus fort est la loi essentielle,
où aimer son prochain ne tient qu'à un cheveux,
je suis beaucoup trop vieux.